Quand on aime la musique et que l’on veut en jouer, on met le doigt dans un engrenage dont on ne soupçonne pas la dimension ; un jour, voilà que le dérivatif devient un métier et hop, du balai, la despote a ravalé vos autres passions (mécanique céleste ou mécanique auto) au rang d’aimables futilités, et un demi-soupir plus tard on se retrouve pianiste professionnel ! Alors, comme je ne passe pas souvent chez Drucker, faisons connaissance et récapitulons, après tout il n’y a pas de honte:

11 ans (et ½ tout de même): première télé avec l’Orchestre de l’ORTF - non, pas à l’Ecole des fans.
14 ans : 1er Prix de piano 1er nommé au Conservatoire National Supérieur, le vrai de vrai, de Paris: ça peut prendre plus de temps, mais ils m'ont libéré pour bonne conduite.
15 ans : le même ou presque en Musique de Chambre, chez Geneviève Joy –Dutilleux- une sacrée pianiste, n’empêche .
Mes bonnes fées de toujours, de celles qui vous enseignent les choses malgré vous: Madeleine de Valmalète, mon idole, Janine Collet qui m’a appris à travailler et bien plus encore, enfin Jacqueline Robin, grande musicienne qui m’a appris tout le reste.
Cycle de perfectionnement avec Pierre Sancan (toute mon affection), et Master- classes :Magaloff, Sandor, Badura-Skoda, Sebök.
17 ans : finaliste du Concours Clara Haskil de Vevey. J’arrête la fac de Droit. Schumann avait terminé, lui, au moins.
18 ans : Lauréat du Concours de Santander, je suis amoureux et je conduis une Ford Capri 2600 Turbo, le Roi n’est pas mon cousin (d’ailleurs les miens sont pianistes, une manie dans la famille). Cours avec Enrique Barenboïm ; moins drôle.
20-23 ans : Longs séjours au Japon, récitals et concerts avec d’excellents orchestres nippons, découverte des arts traditionnels. J’écoute Oscar Peterson à Tokyo.
23-24 ans : Chouette, j’arrête tout et je rentre faire mon service militaire sous les ordres du Lieutenant-Colonel Chopin (authentique).

Bon, après, on ne dit plus son âge, mais entre nous je suis né en France en 1963, de parents Pieds-Noirs ayant voyagé léger depuis leur Algérie natale, et pour des gens dans cette situation, avoir un fils qui veut jouer du Schumann, c’est pas évident, ils ont fait le maximum.

Alors la suite en vrac : concerts avec Orchestre National d’URSS, les Solistes de Moscou et Youri Bashmet, (c’était quelque chose !), tournées en ex-URSS -Moscou, Ekaterinbourg, Kiev-, premier cd de musique française, récital au Concertgebouw d’Amsterdam, concerts avec le ténor Gegam Grigorian, cd Liszt chez BNL-Auvidis, rencontre avec Michel Portal, puis en 96 avec le violoniste Gilles Apap, cher vent de fraîcheur venu de Santa Barbara. "Grande carrière" en duo qui passe par la Drôme, les maisons de retraite californiennes, l’Alaska, la Floride, Moscou, le Châtelet (tout de même) et le Cirque Tzigane Romanès ; on fait un beau disque ensemble (Enescu, Debussy, Ravel) et on a les honneurs de l’American Record Guide (Na !).

En solo, récitals pour Radio-France, créations de Thierry Lancino, Nicolas Bacri et Philippe Racine (cd Genuin à paraître en 2011), les Goldberg de Bach et autres plaisanteries salle Gaveau (cd paru en 2002), un programme pas léger avec la transcription de Liszt de la Symphonie Fantastique, un flirt avec le jazz classique, le Festival de Miami, enfin pas mal d’autres choses plutôt sympa que l’on peut s’autoriser si on est libre comme l’air; et qui prouvent combien vous avez eu raison de visiter cette page aujourd’hui. Au fait, merci !